Espéré, finalement annoncé et très attendu, le déconfinement progressif va devenir une réalité en France à partir du 11 mai. Depuis la mi-mars, le pays vivait à l’arrêt ou presque. Assignés à résidence, contraints de réduire nos déplacements ou de les adapter – notamment dans l’exercice d’une activité professionnelle – nous allons retrouver nos habitudes passées. Enfin, pas exactement. L’après sera teinté de changement. Il sera aussi marqué de la douleur pour ceux qui ont perdu des proches. Mais il sera largement supportable au regard de la crise que d’autres vivent.

Tout va très bien madame la marquise

Si la circulation du virus est limitée à l’échelle de votre département et que la pression sur le réseau hospitalier n’est pas trop forte, feu vert. Vous faites partie des foyers qui ont le droit de retrouver – un peu – de liberté. Mais tout ne va pas revenir à la normale. Les fameux gestes barrières et les mesures de distanciation sociale vont devenir la norme.

Le port du masque, hier moqué et réservé aux plus craintifs des effets de la pollution est devenu tendance. Presque comme une vague digne du monde de la mode, la tendance déferle. Masque, distance, isolation. Bienvenue dans l’après Covid-19.

Si ces mesures vous semblent excessives, si les précautions prises pour éviter un retour de l’épidémie vous paraissent insupportables, lisez ce qui suit.

Depuis les premiers cas apparus en décembre à Wuhan, plus de 3,39 millions de personnes ont été diagnostiquées comme porteuses du nouveau coronavirus. 241 000 personnes sont mortes sur toute la planète[i]. Tout va mieux maintenant ? Pas si sûr.

Gérer l’épidémie, gérer le quotidien

Au Brésil, avec des populations très vulnérables – comme les habitants des favelas ou les indigènes – le taux de contamination est le plus élevé du monde (2,8), selon l’Imperial College of London. Le président Jair Bolsonaro est sceptique face à ce virus, le nombre de cas déclarés serait ainsi très faible par rapport à la réalité du terrain.

En Colombie ou au Panama, des manifestations spontanées pour « ne pas mourir de faim » se tiennent dans les rues. On se bagarre pour acheter des vivres.

A Djibouti, en Ethiopie, en Erythrée ou encore en Somalie, c’est l’état d’urgence. Avec des capacités pour tester les personnes qui affichent des symptômes bien trop faibles, et des préoccupations quotidiennes déjà très fortes, le virus fait des ravages. Nous, en France, allons gérer l’épidémie. Eux, doivent déjà gérer leur quotidien.

Au Yémen, ravagé par la guerre, la famine progresse chaque jour. En raison des conséquences économiques de la pandémie de Covid-19, l’Organisation des Nations Unies (ONU) estime que le nombre de personnes au bord de la famine pourrait passer de 135 à 265 millions de personnes cette année[ii]. « On estime qu’il y a plus de personnes qui vont mourir à cause de cette récession qu’à cause du virus en lui-même », s’alarme Tiphaine Walton, porte-parole du Programme alimentaire mondial de l’ONU.

A Manille, la distanciation est un luxe inaccessible et l’épidémie déclenche une pénurie alimentaire sans précédent. Le virus s’ajoute à la misère comme on peut le lire dans ce sujet poignant de Paris Match. « Le refrain que l’on entend le plus souvent dans les rues de Manille ce n’est pas la peur de mourir du Covid-19, mais celle de mourir de faim. »

Notre déconfinement nous amène sur le chemin de la « normalité ». Nos métiers vont évoluer. Les espaces de bureaux vont s’adapter. Mais partout ailleurs dans le monde, (dé)confinement ou non, la crise sanitaire, économique et financière poursuit son travail de démolition. Plus que jamais, nos yeux ne doivent pas être centrés sur notre quotidien modifié mais supportable. Tournons notre regard et aidons ceux pour qui le 11 mai n’est pas une date de libération.

A Manille, comment aider la fondation Anak ?

https://www.anak-tnk.org/comment-aider/

[i] Chiffre bilan établi par l’Agence France-Presse (AFP) à partir de sources officielles samedi 2 mai https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/02/coronavirus-dans-le-monde-deconfinement-a-des-rythmes-varies-aux-etats-unis-qui-misent-sur-le-remdesivir_6038412_3244.html

[ii] https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/societe-africaine/famine/coronavirus-le-nombre-de-personnes-au-bord-de-la-famine-pourrait-doubler-en-2020-alerte-l-onu_3927311.html