Le monde des crypto-monnaies vous paraît déjà assez complexe et nébuleux ? Attendez un peu ! Facebook entend également se lancer dans le monde des crypto-monnaies. Si le projet d’origine est louable, il attire toutefois de nombreuses critiques et est fortement mis en cause par l’administration américaine qui y voit une menace potentielle face à la suprématie du dollar. Explications.

Aux origines du projet Libra

Présenté en juin 2019, le projet de création d’une cryptomonnaie par Facebook – baptisé Libra – a pour objectif de s’adresser aux personnes qui n’ont pas ou peu accès aux services bancaires. Il s’agit d’une monnaie virtuelle avec une indexation sur un panier de devises stables (dont le dollar, le yen ou l’euro).

  • La Libra vise à simplifier le transfert d’argent entre particuliers.
  • La Libra se destine au paiement de services et produits en ligne.

L’achat, la vente mais également la conservation de la Libra est prévue au travers d’un portefeuille baptisé Calibra. Basée sur la blockchain (avec un système fermé) la Libra doit être gérée par une association basée en Suisse. Oui, Facebook entend montrer qu’il n’est pas le seul maître à bord.

David Marcus, un ancien de chez PayPal et Messenger – qui aurait soufflé le projet Libra à Mark Zuckerberg – met tout en œuvre pour que Facebook ne dispose ni de plus de pouvoir, ni de plus de droits de vote que les autres membres. L’idée est de rassurer investisseurs et futurs utilisateurs. Le choix de la Suisse est également stratégique : « C’est une plateforme internationale neutre, ce qui est important pour la création de confiance nécessaire pour ce projet » confie David Marcus. Mais il s’agit pourtant là d’un point qui attire la critique outre-Atlantique.

La Libra, menace intérieur ou atout économique pour les Etats-Unis ?

Devant la commission des finances de la Chambre américaine des représentants(i) , Mark Zuckerberg a dû défendre son projet face à une hostilité palpable. Et si, sans le dire, cette Libra devenait une monnaie souveraine capable de venir concurrencer le dollar ? « Notre but est de construire un système de paiement, plus que de créer une monnaie. Puisque nous l’imaginons mondial, nous avons pensé qu’il serait préférable de l’adosser à une cryptomonnaie » répond Zuckerberg.

Quelles sont les ambitions de la Libra ? En se fiant aux projets d’origine, il s’agit bien de favoriser l’accès aux services bancaires de nombreuses personnes qui y échappent encore, aux États-Unis mais plus largement dans le monde. La Libra est présentée comme « la monnaie du monde libre » mais les différents scandales qui touchent Facebook et son dirigeant permettent de douter de cette vocation philanthropique.

Avec plus de 2 milliards d’utilisateurs à l’échelle mondiale, le géant des réseaux sociaux constitue une réelle menace et pourrait remettre en jeu « la souveraineté monétaire des Etats » comme le confie le ministre français des Finances, Bruno Le Maire. À l’heure actuelle, la France s’oppose au développement de cette cryptomonnaie attendue pour le premier semestre 2020.

Avec plusieurs partenaires qui se sont déjà retirés du projet, cette monnaie virtuelle semble avoir désormais du plomb dans l’aile. L’audition de Mark Zuckerberg devant la commission des finances de la Chambre américaine des représentants n’a pas été une réussite, et le dirigeant semble clairement déstabilisé. Peut-il convaincre les autorités américaines et d’autres partenaires notamment européens de développer son projet ? Son axe de communication le plus fort est le patriotisme, qu’il entend valoriser dans les mois à venir. « La Libra va permettre de perpétuer la prédominance du système financier américain dans le monde, notamment vis-à-vis de la Chine » a confié le dirigeant. Alors, cette Libra, nouvelle arme dans la guerre économique qui oppose la Chine et les États-Unis ou projet déjà mort nés à cause des scandales associés à l’image de Facebook ? Réponse dans les mois qui suivent…